Il y a quelques jours, je me trouvais à la Cité du cinéma de Saint-Denis ; déambulant entre les décors fantastiques des plateaux de tournage, mon regard est attiré par des flammes impressionnantes léchant ce qui ressemble à la flèche d’un clocher. Je suis hypnotisé par ce terrifiant spectacle. Le brasier avance, implacable le long de la charpente. Soudain un craquement sinistre accompagne la chute de la flèche vaincu. “Coupé !” Je sors brusquement de ma torpeur et reconnaît la voix de mon vieil ami. En me voyant, Jean-Jacques Annaud me rejoint.
Il me parle de son nouveau projet « Notre-Dame brûle”, long-métrage retraçant l’incendie de Notre-Dame de Paris. Pour son film, le réalisateur a décidé de recréer en studio des scènes de feu spectaculaires. Sur les plateaux de tournage, une équipe de pompiers professionnels veille au bon déroulement de chaque scène. Au fil de la conversation, il se souvient du tournage d’un de ses films cultes, Le nom de La rose, pour lequel tout ne s’était pas passé comme prévu, et en particulier quand il avait fallu filmer la scène finale: l’incendie de l’abbaye.
Tout au long de cet échange passionnant, j’ai ainsi appris des anecdotes absolument géniales sur le tournage du film éponyme du roman D’Umberto Eco. Fidèle lecteur, il est temps de te révéler les secrets de ce tournage !
Le nom de la Rose, un film qui a failli ne jamais voir le jour
Synopsis : deux moines franciscains, Guillaume de Baskerville et le jeune novice Adso enquêtent sur les morts mystérieuses de plusieurs moines dans une abbaye au Moyen-Age.
Le nom de la Rose, adapté par Jean-Jacques Annaud en 1986, succès international aux nombreuses récompenses, aurait pu être bien différent, sinon ne jamais voir le jour.
Sean Connery, figure emblématique incarnant Guillaume de Baskerville, n’est absolument pas prédestiné à ce rôle. Au contraire, Jean jacques Annaud ne souhaite pas de tête d’affiche et encore moins d’un ex-James Bond dans son film. Pourtant, l’acteur se démène pour avoir le rôle. Son agent de l’époque, Bernd Eichinger, appelle le réalisateur tous les quinze jours pour le convaincre de lui donner le rôle. Sean Connery rend alors une visite surprise au réalisateur et lui joue à brûle-pourpoint son personnage. Jean-Jacques Annaud, époustouflé par sa prestation, lui donne le rôle. Un coup de poker réussi pour l’acteur soixantenaire.
Cependant, l’agent de Jean-Jacques Annaud, devenu entre-temps PDG de la Columbia, refuse d’associer le distributeur américain à un film intégrant Sean Connery. Il le juge désormais “ringard”. Sans informer le réalisateur, il hypothèque tous ses biens, les droits du film, et même ses bureaux en Allemagne pour financer le tournage. Heureusement, le film est un succès ! 77 millions de dollars de recettes et un César du meilleur film étranger en 1987.
Incendie de désir et de fumée
A l’époque, l’acteur jouant Adso, Christian Slater, n’est âgé que de 16 ans. Il est encore vierge et appréhende la scène où il doit jouer un acte sexuel. Pour rendre la scène encore plus intense, le réalisateur n’informe pas l’acteur que l’actrice se dénudera devant lui. La scène est filmée en petit comité et l’effet de surprise réussi.
La scène finale a également donné des sueurs froides au réalisateur. L’équipe de tournage a oublié de monter le faux plafond qui devra s’effondrer sur un des personnages. L’équipe fabrique en urgence le faux plafond et quelques heures après, Jean-Jacques Annaud commence à tourner. Le plafond s’effondre comme prévu sur l’acteur alors âgé de 82 ans mais il ne bouge plus. Autour de lui, tout est en feu pour reproduire l’incendie de la bibliothèque secrète. La femme de Jean-jacques Annaud se précipite sur le plateau pour aider le comédien. L’équipe qui a fabriqué le faux plafond a en fait utilisé de vraies poutres en bois massif !
D’autre part, la scène finale qui consiste en un spectaculaire incendie d’une des tours de l’abbaye, doit malheureusement se contenter de moitié moins de plans que prévus. En effet, l’équipe chargée d’allumer les cinq caméras tout autour du décor en feu, n’allume pas les caméras 2, 4 et 5. Une fois le décor parti en fumée, Jean-Jacques Annaud se rend compte que seulement deux caméras tournaient ! Heureusement, il réussit à monter la scène finale avec les quelques images qu’il a récolté.
Et voilà, tu connais maintenant les multiples périples par lesquels le réalisateur a dû passer pour que son film voit le jour !