Les lumières se rallument, le neuvième volet de la saga Fast & Furious vient de prendre fin. Alors, chef- d’œuvre ou divertissement ? On entend souvent le cinéma être qualifié de divertissement, l’est-il toutefois? Le divertissement est communément admis comme une activité qui amuse, détourne l’homme des choses sérieuses. En outre, il se consomme. C’est un marché à part entière. Le divertissement est amusant et lucratif, peut-on en dire autant de l’art ? Essayons de comprendre la place de l’art, et en particulier du cinéma, dans une société qui recherche avidement le divertissement.
L’art peut-il être rentable ?
En tant qu’ “industrie” cinématographique, le cinéma doit être rentable. Tout artiste aujourd’hui a à l’esprit l’aspect économique de son travail. Le temps des mécènes étant révolus et le poète maudit n’étant plus à la mode, l’artiste se voit contraint de plaire. Le cinéma, mais aussi la peinture, la musique, tous les arts doivent aujourd’hui se soumettre au tout puissant capitalisme. En 2019, le marché de l’art représente à lui seul plus de 60 milliards de dollars. L’œuvre en elle-même n’est plus l’ultime horizon de l’art, elle doit désormais remplir des prérogatives financières. On est ainsi en droit de se demander si le processus créatif en pâtit.
Dans le cas du cinéma, et comme dans tous les autres domaines artistiques, tous les films ne sont pas des chefs-d’œuvre. Il est même certainement plus difficile pour le cinéma de se réaliser en tant qu’art. En effet, un film est excessivement dispendieux et l’exigence de couvrir les frais de production prend parfois le pas sur le projet artistique. On parle alors de divertissement. Néanmoins, l’art peut être lucratif à condition que cet aspect ne soit pas son essence. On ne crée pas une oeuvre d’art pour gagner de l’argent, on la crée parce qu’elle matérialise une forme d’absolu.
L’art peut-il être drôle ?
Mais le divertissement, ce n’est pas seulement un marché, c’est aussi une activité agréable, amusante. Il fait “diversion” et nous détourne des préoccupations liées à notre condition. Le divertissement existe justement pour ne pas penser à l’essentiel, pour ne pas penser tout court. De son côté, l’art tend vers un absolu, vers la réalisation pleine et entière de l’Idée. L’art recherche justement l’essentiel. En ce sens, l’art ne peut être un divertissement. Cependant, cela ne signifie pas que l’art doit être sérieux pour toucher l’essentiel. En effet, l’art n’est pas toujours grave, il peut être drôle ou coquin.
On pense notamment au ready-made de Marcel Duchamp. Une de ses œuvres les plus célèbres intitulée Fontaine consiste simplement en l’exposition d’un urinoir renversé accompagné de l’inscription “R.Mutt. 1917”. L’art se moque de lui-même. L’humour provoque, interpelle et souligne les incohérences du réel. Il est à bien des égards très juste pour représenter le monde. C’est pourquoi le cinéma aurait tort de s’en priver. Les comédies, au même titre que les films d’auteur, ont donc leur place au rang d’oeuvres artistiques.
Nous clôturons ce dossier croisant philosophie et cinéma et espérons que cela t’a plu ! Si tu as des questions ou des remarques n’hésite pas à me les poser.
Castman